Mal Waldron
Rat Now…Paris 70
- Gatefold - Tip-on
- SAM RECORDS
- 29 novembre 2024
Cet enregistrement a été réalisé dans les salons du Palais d'Orsay à Paris le 10 mars 1970. Le Festival international du son se tenait alors dans cette ville et cet enregistrement a été diffusé dans l'émission de radio « Jazz Vivant » présentée par André Francis. L'interprétation de ce disque est une première, et elle témoigne de la renaissance du pianiste Mal Waldron à la tête d'un trio composé du batteur Christian Vander (cofondateur du groupe Magma) et du bassiste Jean-François Catoire (partenaire de longue date de Vander). La carrière de Waldron reprend après son exil européen, un long hiatus lié à son patient processus de reconstruction après des années passées à lutter contre son addiction.
En 1969, il enregistre Free at Last pour le tout nouveau label ECM (il s'agit de leur toute première production) et deux ans plus tard, il fait de même pour le label Enja. Avant cela, en 1970, il avait également effectué sa première tournée au Japon, ce qui l'avait rendu instantanément populaire dans ce pays.
Avant le présent concert enregistré le 10 mars 1970, Mal Waldron s'était produit l'année précédente (un concert d'été) dans un club d'Antibes, l'Early Bird, avec les mêmes camarades, à savoir Christian Vander et Jean-François Catoire. De nombreux critiques avaient salué la qualité de ce trio dans les médias, et le regretté Maurice Cullaz, grand admirateur de Waldron, avait même déclaré qu'il avait « rarement entendu ces trois musiciens jouer d'une manière aussi extraordinaire ».
Il était donc logique, lorsque le trio s'est retrouvé en mars à Paris, que la même cohésion se manifeste dans leur morceau d'ouverture « Rat Now », un thème qui figurait sur l'album Free at Last enregistré pour ECM (novembre 1969) quatre mois seulement avant ce concert. Le pianiste joue tout au long du morceau dans son style caractéristique, la main gauche accentuant un souffle constant tandis que la main droite libère une énergie contrôlée. Les percussions débridées de Christian Vander donnent une dimension libre à cet air, qui confère une sorte d'austérité qui montre l'influence fondamentale du grand Thelonious Monk sur le style pianistique de Waldron, aux côtés de Bud Powell : « Après être tombé dans les profondeurs, je n'ai pas pu retrouver le côté lyrique de mon jeu. La façon dont je m'exprimais était devenue plus dense ; elle s'était recentrée davantage ». Cet héritage est encore plus palpable dans l'air qui suit, « Champs Elysées », une composition de l'album Impressions (1959). Les lignes mélodiques, imprégnées de blues, se mêlent allègrement aux figures tourbillonnantes de Mal et de ses partenaires.
« Rock My Soul » - et son tempo endiablé, où l'on mesure une fois de plus la force et la complémentarité de la main gauche de Waldron, transmettant un rythme effréné sous le lyrisme contrôlé de sa main droite - figurait également parmi les compositions récemment enregistrées par le pianiste sur la session Free at Last. La batterie tumultueuse de Vander alimente ici le flux d'un jazz robuste qui regorge de phrases vigoureuses ; et lorsque le tempo s'apaise, la contrebasse de Jean-François Catoire instaure une trêve qui ne trompe personne : elle annonce un final fiévreux.
Le thème final « Mount Fujiyama » a été inspiré par un voyage au Japon que Waldron a effectué au cours de l'hiver 1969-70. La musique porte ici l'empreinte de la sérénité, tout en reflétant une fois de plus l'héritage new-yorkais profondément enraciné de Mal Waldron.
Romain GROSMAN - Traduction de Martin DAVIES
A2. Champs-Elysées
B1. Rock my Soul
B2. Mount Fujiyama